Miami, terrain de jeu de Liberty Media
- Ilan Benoit

- 9 mai 2022
- 4 min de lecture
Nous l'attendions depuis un an et le voici enfin; le premier Grand-Prix de Miami. Le nouveau circuit tourne autour du Hard Rock Stadium, stade des Dolphins (NFL) dont le président se trouve, comme par hasard, être également le promoteur du nouveau GP. En dehors de cela, le premier pays à accueillir trois Grand-Prix (dès 2023, Austin, Miami et Las Vegas) en dehors du Covid (Italie 2020, Imola, Monza et Mugello) est aussi celui dont est originaire Liberty Media, qui possède les droits commerciaux de la F1.
A la fois rapide et sinueux à l'image de Bakou, Melbourne ou Djeddah, le nouveau tracé comporte nombre de démesures typiquement américaines: une chicane sous une autoroute, un contournement du stade pour montrer le logo Hard Rock, une marina factice avec dix yachts amenés en camion... L'événement apport logiquement la controverse car il s'inscrit dans une lignée Etats-Unienne qui sacrifie l'histoire et l'essence même du sport au profit d'un spectacle ''intense et permanent''. Pourtant, ce ''US Show'' s'est montré bien fade une fois le départ donnée; une procession de 57 tours dont le seul points d'orgue fût un départ tout de même bien sage, uniquement marqué par le dépassement du champion en titre sur son acharné rival. L'ignominie ne s'est pas terminée une fois le drapeau à damier abaissé; après nous avoir servi des interviews d'après-course où Willy T. Ribbs (ancien modeste pilote) décrivait cela comme ''Le plus grand événement sportif du monde'' et ne posait aucune question sur la course, il fallut attendre trente minutes pour que des motos de police sirènes criantes amènent les trophées à des pilotes vêtus de casques de football américain. Make America great again.





Le nonsense de ce Grand-Prix se matérialise par des yachts amenés en camion sur une mer en plastique, un secteur situé sous l'autoroute
C'était pourtant Leclerc qui dirigeait les qualifications avec son lieutenant Carlos Sainz, devant des Red Bull essoufflés. Au lâcher de bêtes dimanche soir, c'est finalement Max Verstappen qui prenait le meilleur sur un Sainz patinant, avant que son rythme intense ne l'emmène au travers du fier cheval en tête, quoiqu'un peu boiteux ce jour-là. Celui que l'on surnomme le ministre de la défense* profitait d'une Safety Car pour obtenir un arrêt gratuit et attaquer son homologue Ferrariste Carlos Sainz. Un blocage de pneus dans le virage 1 l'empêchait ensuite de faire le fruit de sa gomme neuve, ceci et un perte de 30 chevaux le faisant trébucher au pied du podium. Toujours trop lente pour le logo Mercedes qui est le sien, l'alliance Hamilton-Russell s'est contentée de 18 points qui font pale figure face aux 33 de Ferrari ou aux 38 de Red Bull.
Cette première édition pose les bases d'une nouvelle F1 Netflix dont on avait vu les prémices l'an dernier, qui se déplace où sont les paillettes, le cash et les coupes de champagne pour s'éloigner de l'odeur de gomme brûlée, qui se veut proposer une piqûre de spectacle à des pseudo-fans ignorants en manque d'intérêt. Le problème survient lorsque cette piqûre n'est qu'un impuissant placebo, un substitut de spectacle où seul le départ et le chaos du premier virage nous tiennent éveillés à 23h, tel un documentaire animalier que l'on regarde sur Arte en somnolant un samedi soir. Le sommet de l'affaire est dans le fait que l'intérêt que l'on trouve dans ces cinq premiers Grand-Prix ne réside en rien dans la nouvelle règlementation radicale mais uniquement dans des crashs, des problèmes de fiabilité ou une bataille Charles-Max où le taureau Néerlandais remplace le roi Britannique, face à un cheval monégasque nouvellement nommé comme jeune ''fauteur de trouble'' (avec tout le respect qu'il mérite).

Plus grand journaliste de la F1 et adoré des amateurs de ce sport, Will Buxton montre les points faibles du Story-telling de Netflix (vouloir scénariser tout ce qu'il y a de banal). Son expertise ne font plus débat et personne ne conteste ses connaissance mais même en étant l'un des grands experts de ce domaine, le géant américain Netflix écrit ses répliques, qui ne relèvent d'aucune pertinence :
Quand vous êtes premier, les 19 autre pilotes sont derrière vous
Quand les pilotes s'arrêtent pour changer de pneus, ils repartent avec de nouveaux pneus
Si tu recules, tu ne peux pas avancer
...
La politique et la philosophie de côté, Verstappen revient à neuf longueurs de Charles Leclerc, mais les récentes contre-performances de Carlos Sainz ne lui donnent que la cinquième place derrière George Russell et Sergio Perez. Du côté des constructeurs, six petites briques séparent aujourd'hui Italiens de Néerlandais, alors que Mercedes semble se résigner à une fin de domination; un retard de 62 points en cinq course est rattrapable mais cela relèverait du coup de chance ou de génie. McLaren s'impose petit-à-petit comme leader du midfield (milieu de plateau) en menant de peu sur la meilleur surprise du championnat: Alfa Romeo. Dans la moitié plus décevante du plateau on retrouve Alpine dont l'un des pilotes (Esteban Ocon) a été privé de qualifications à cause d'un crash en essais, et dont l'autre (Fernando Alonso) s'est vu retiré du Top 10 à cause d'une pénalité. Suivent ensuite AlphaTauri qui peine où un Gasly, brillant en 2021, est dominé par le jeune Yuki Tsunoda, Haas qui réalise un bon début de saison mais a vécu un deuxième week-end bien difficile à domicile.
En queue de peloton se trouvent deux équipes qui embarquaient de très belle promesses l'an dernier mais ne montrent aujourd'hui aucune évolution; Aston Martin et Williams.

Après avoir fait débat pour avoir ramené au calendrier l'ennuyeux circuit d'Imola (sa ville natale), Stefano Domenicalli (président de la Formula One Management) s'attire à nouveau les foudres du public avec ce cirque américain





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